Né d’un intérêt mutuel pour leurs travaux respectifs, le projet collaboratif en trois parties de Tedi Tafel et de Vida Simon explore à la fois la relation de la performance d’un artiste à son public, et l’influence des événements cosmiques sur notre vie quotidienne. Pour aborder cette recherche, les artistes font principalement appel à l’élément de jeu (non dans le sens d’un jeu compétitif, mais par une approche ludique des événements quotidiens). Cette approche se manifeste déjà dans des oeuvres précédentes. Par exemple, Tedi Tafel explique, en parlant de l’intervention immersive intitulée From the Cougar Cabin to the Seven Cedars, qu’après s’être promenée tous les jours dans son environnement, « par pure curiosité, je me suis mise à faire des frottis de l’écorce d’un bouleau en utilisant du papier calque et du fusain ». Ce type d’interaction avec ce qu’elle voisine peut se comparer à celui d’un enfant qui laisserait l’observation influencer librement son interaction.
Dans un essai intitulé « The Education of the Un-Artist, Part II », Allan Kaprow y va de l’explication suivante :
L’imitation […] est peut-être une manière moderne mais transcendantale d’aborder le jeu qui, parce qu’elle est intellectuelle – ou mieux, intelligente –, permet aux adultes de s’y adonner sans crainte de sembler puérils. Tout comme le jeu d’imitation des enfants peut être considéré comme un rite de survie, ce stratagème pourrait assurer la survie de la société. Par [ce stratagème], le talent qu’a l’artiste de révéler l’interchangeabilité des choses pourrait être mis au service de « la civilisation et de ses malaises ». Autrement dit, il pourrait contribuer à rassembler ce qui a été démonté.
Dans ce cas-ci, « ce qui a été démonté » serait les relations entre individus ainsi que notre lien au monde naturel à l’intérieur même de nos manières courantes de fonctionner dans notre environnement artificiel. Rassembler ne signifie toutefois pas offrir une solution. Par une imitation expérimentale basée sur l’improvisation, le travail des artistes crée plutôt un point à partir duquel il est possible de découvrir diverses analogies et les interprétations qui en découlent.
Questionnant la relation traditionnelle entre le performeur et le public où l’un est séparé de l’autre, Tedi Tafel et Vida Simon proposent au public différents styles d’interaction. Reprenant à leur compte des interactions qui ont cours en société, les artistes jouent avec la présence et l’absence, la distance et la proximité en alternant entre performances à l’intérieur et à l’extérieur, de même qu’en utilisant la fenêtre comme une sorte de « surface poreuse » qui peut diviser le public. Pour les artistes, cette action devient une recherche, en quelque sorte, sur la méthode et l’intimité de la performance. Pour le public, elle devient une analogie, extraite de son contexte quotidien, des relations avec d’autres individus ou organismes.
Pour leur dernière performance de longue durée, Tedi Tafel et Vida Simon explorent le solstice d’été. Le considérant comme une période de pause, alors que la lumière est à son maximum, elles interrogent son influence sur notre vie quotidienne, de même que son potentiel comme « métaphore enveloppante ». Par une représentation expérimentale basée sur l’improvisation, elles suspendent cette occurrence naturelle dans une sorte de relation anormale avec la société. Loin d’être didactique, leur travail, imprévisible autant pour elles-mêmes que pour le public, demeure ouvert à l’interprétation. Conséquemment, elles arrivent à identifier les structures de micro-relations et de macro-relations inconscientes et conscientes entre les humains et l’environnement naturel.
Ne requerrant plus de dispositifs matériels comme les ready-mades de Duchamp pour distancier une expérience du quotidien, leur travail, différent d’une certaine manière de l’analyse académique, porte sur les relations humaines courantes avec l’environnement et les déplace afin d’offrir d’innombrables points d’interprétation. Ces derniers peuvent servir à réunir l’environnement artificiel et sa contrepartie naturelle aussi bien que les personnes, dont les artistes, au sein de leur environnement social. Avec un intérêt critique pour la préparation, la recherche et la présentation, ces performances proches du rituel deviennent une exploration non seulement de la nature et de la vie au quotidien, mais également des processus menant à la performance et de leur capacité d’exister comme composantes de l’oeuvre présentée.
Andrew Frosst est un artiste protéiforme
Andrew Frosst est un artiste protéiforme ayant une collection éclectique de connaisances qui génère de l’art visuel et de la littérature de manière indépendante et avec Arbour Lake School Collective.